« Vous êtes bien chez Ismaël et Collin, nous pouvons pas vous répondre pour le moment car nous sommes bien occupés. Nous n’avons pas besoin de vous faire un dessin ? Allez, laissez votre message et vos cordonnées après le bip sonore et… » J’arrête ce message. Je ne sais même pas pourquoi je l’écoute. Il n’a plus de raison d’être, et pourtant pourquoi mon doigt à tant de mal à l’effacer ? Je remonte mes manche et je me gratte le poignet droit, celui-ci déjà si rouge et meurtrie par ce manque qui pourrait me rendre fou – si je le connaissais pas déjà. Ce n’est pas la peine de me faire violence aujourd’hui en comptant toutes mes anciennes tentatives pour rester clean et qui se sont toutes vouées par un échec. Alors, je violente ma peau et je la cache. Je débranche le répondeur mais je n’arrive pas à effacer ce message que nous avions fait ensemble. Je le range la boite vocale dans un carton. Après tout, tout lui appartient dans cet appartement. Je ne sais même pas pourquoi il me le laisse. Mes pauvres salaires décousus à travers les années n’ont jamais vraiment aidé notre couple. Mais, c’était avant, je vais changer, vraiment. Alors, je rassemble les cartons dans l’entrée et je marque son nom sur ses objets qu’il m’a demandé de rassembler pour lui. Je ne peux m’empêcher de dessiner un cœur à côté son prénom. Non, car je pense pouvoir le récupérer avec un geste aussi dérisoire, mais tout simplement car c’était ma manière à moi que j’avais de marqué son prénom. Quand par exemple je laissais un message à son attention sur notre frigo.

Il est temps de me rendre au travail. La journée est si longue et épuisante, surtout quand on lutte à chaque minute contre ce démon qui veut vous dévorer. Celui qui ne vous laisse aucune minute de répit. Le métier d'Infirmier devient un combat de chaque seconde: les seringues, les injections, les drogues pour endormir les patients. Mon corps sue pour évacuer ce stress qui me donne des sueurs à froides répétitions. Je fais honte à mes collègues et à moi-même. Mais, pour la première fois, j'ai un but. Je veux prouver à Ismaël que je peux y arriver. Pour gagner quoi ? Je ne sais pas...Lui montrer peut-être tout simplement qu'il ne sait pas battu toutes ses années pour rien. Tout ce temps et cet argent pour moi. Alors, je m'accroche. Je souris et je m'amuse de ses auréoles sous mes bras. Je me propose même de changer mes heures avec un collègue pour qu'il puisse voir sa fille. Moi, je me dis qu'une douche ne me ferrait pas de mal.

Mais, alors que ma main se pose sur la poignée de l'appartement. Je sais. La porte n'est plus fermée. C'est à dire qu'Ismaël est là derrière cette épaisse frontière de bois et d'acier. J'hésite. Je baigne dans mon jus. Mais, je me trouve soudainement stupide. Je prends mon courage à deux mains et je finis par pousser la porte. « Excuse-moi...Je rentre... » Je secoue mon habit d'infirmier avec mon col complétement trempé et baisse la tête. Je ne sais pas ce qu'il fait là, mais je veux le savoir. « Ismaël ? Tu es là ? » Je me gratte à nouveau le bras.