Bien qu'il n'ait évidemment pas programmé le moindre réveil, Troy fût réveillé assez tôt ce matin, ou tout du moins, plus tôt qu'à l'habitude puisqu'il n'était que neuf heures et que, déjà, ses yeux captaient les premiers rayons de soleil qui venaient lui en picoter les yeux à travers la seule petite fenêtre que possédait sa chambre d'étudiant, laquelle il partageait, pour son plus grand bonheur, avec Harrison. Alors, cette sensation d'éblouissement lui étant plutôt désagréable, il se retourna dans son lit de façon à se cacher de la lumière, mais ce qu'il en vit ne l'en réjouit pas plus : il n'était pas seul dans son lit. Une personne - autant dire qu'il espéra de tout son coeur qu'il s'agisse bien d'une fille - était allongée à côté de lui, le visage recouvert dans son intégralité par le haut de la couverture. C'est donc avec méfiance qu'il souleva doucement le bord de cette dernière, et il y découvrit le visage d'une petite brune, encore endormie. Que faisait-elle ici ?

Encore quelques peu dans le gaz lui aussi, le jeune homme mit un certain temps à se souvenir de la soirée de la veille, il se rappelait bien s'être rendu à une fête, avoir discuté avec quelques connaissances, avoir participé au concours de shooter, puis... plus rien. Un vide total. Ceci dit, l'alcool avait toujours eu un effet assez dévastateur sur Troy qui avait fâcheusement tendance à oublier chacun de ses moindres faits et gestes. Et il en avait totalement oublié sa toute nouvelle conquête, d'ailleurs, il fût purement incapable de se remémorer son prénom... Comment allait-il la réveiller s'il ne savait même pas comment il était censé l'appeler ? Après tout, personne ne l'obligeait à la réveiller en douceur : c'est donc avec cette idée en tête que le beau brun se tourna en peu plus, et un peu plus encore, se décalant sur son propre matelas jusqu'à faire rouler la jeune femme qui en chuta à même le sol. Évidemment, ceci ne manqua pas de la tirer du sommeil.

« Qu'est-ce que... Hey ! »
« Je ne fournis pas le petit-déjeuner. »
« Mais Troy, c'est du sérieux nous deux... Pas vrai ? »

Si le jeune homme avait jusqu'à présent laissé son visage enfoui dans son oreiller, il ne tarda pas à le redresser à la simple entente des paroles de la petite brune. Sérieux ? Il ne s'était jamais montré sérieux dans une relation, ni avec elle, ni avec une autre, et ce n'était pas près de commencer. Malgré cela, il fallait bien avouer que ce n'était en rien un plaisir pour lui de devoir l'annoncer à cette jeune fille, quel que soit son nom. C'est alors avec un sourcil légèrement rehaussé et avec un petit sourire crispé qu'il reprit la parole.

« Du sérieux ? »
« Tu m'as dis que tu m'aimais... »
« J'ai dis ça moi ? »

Autant dire qu'il fallait que le beau brun arrête l'alcool, dès aujourd'hui, il ne pouvait pas se permettre de jouer de cette façon, après tout, peut-être était-il particulièrement prétentieux et orgueilleux, mais il n'en était pas pour autant méchant et il n'aimait pas avoir à blesser qui que ce soit, pas même une fille de ce genre. C'est donc finalement avec toute la compassion du monde que, vêtu tout de même de son boxer, il se releva du lit afin de ramasser les quelques affaires qui trainaient autour de son lit et qu'il devinait appartenir à la jeune femme, laquelle il ne tarda pas à raccompagner en direction de la porte.

« Mais, c'est vrai, je t'aime beaucoup... Emmie ! »
« Mon prénom c'est Cassandra. »
« Ah oui, c'est ça, Cassandra, au revoir Cassandra ! »
« Mais je... T'es qu'un enfoiré Carter ! »

Bien qu'il eût fermé la porte juste devant son nez, les quelques dernières paroles de Cassandra résonnèrent à travers tout le couloir. Certes, il ne s'était pas montré très gentil envers elle, mais qu'y aurait-elle gagné si il lui avait donné plus d'espoir encore ? Après tout, ce n'était pas la première à tomber dans les beaux bras musclés du sportif, elle avait dû entendre parler de lui : elle aurait dû savoir qu'une histoire sérieuse n'était en aucun cas envisageable avec Troy.

C'est donc soulagé par le départ de la jeune fille qu'il se dirigea vers le petit réfrigérateur que lui et Harrison avaient finalement installé dans leur chambre, bien qu'ils n'y passent pas la majorité de leur temps, il leur était toujours utile d'avoir de quoi manger. Cependant, dès qu'il l'ouvrit, un détail le frappa assez vivement : sa bouteille de lait n'était plus là. Et si il y avait bien une chose que Troy détestait, c'était de ne pas avoir son verre de lait le matin. Après tout, il faisait très attention à lui, et son régime sportif lui imposait visiblement un apport de calcium au réveil.

« Pierce ! Qu'est-ce que t'as fait du lait ?! »

Autant dire que pour Troy comme pour Harrison, ce n'était pas un réel plaisir de partager cette chambre l'un avec l'autre, en vérité, dire qu'ils ne « s'aimaient pas » c'était faire un euphémisme, c'était pire encore. Depuis qu'Harrison avait fait un sale coup à son colocataire qui n'était à l'époque qu'un bizut, ce dernier lui vouait même une haine assez intense. Ils en étaient d'ailleurs déjà venus aux mains lors de soirées un peu trop alcoolisées. Cependant, ce matin, Troy était bien trop fatigué et bien trop épuisé par la jeune fille qui venait de lui aspirer toute sa bonne humeur pour aller jusque là. Il se contenta donc d'écouter la réponse de son colocataire à propos du lait, et bien évidemment, il comprit qu'il en profitait pour se moquer de lui et pour tenter par tous les moyens de le faire enrager, ce qui d'ailleurs avait bien des chances de fonctionner étant donné sa gueule de bois et sa fatigue accumulée depuis quelques jours.

« Ouais, eh bah étouffe-toi avec ton foutu café, je sais ce que je dis : il restait du lait. »

C'est donc sur ces quelques mots que le beau brun jeta un dernier coup d'oeil envers le frigo avant de le refermer pour de bon, mais une petite tâche de bleu dans la poubelle posée juste à côté attira son attention : le bouchon de la bouteille de lait... vide. Peut-être l'avait-il déjà finie, finalement. Tant pis. Sur un point, Harrison n'avait pas tort : il trouverait très certainement ce qu'il cherchait à l'étage inférieur, les bizuts s'étaient récemment chargé des courses. Et puis, de toute façon, s'ils avaient oublié le lait, ils retourneraient en chercher, ce n'était certainement pas à Troy de s'occuper de cela, ou tout du moins, plus maintenant. Et autant dire qu'il était bien heureux d'être passé du rôle de bizut à celui de vrai Gamma l'année passée, son bizutage avait été plutôt mouvementé et il en devait une bonne partie à son très cher colocataire.

Alors, sans trop se poser de questions, il enfila à la hâte un jogging, se préparant donc à sortir bien qu'il resta torse nu, qui dans cette confrérie se soucierait de la façon dont il était habillé ? Et puis ce n'était pas comme s'il était très pudique. Tandis qu'il s'approchait doucement de la sortie, il fût interpellé par les paroles d'Harrison, lequel lui demandait de lui faire un café et critiquait ouvertement la dernière conquête de Troy.

« Mh... On est d'accord sur un point : sa voix était insupportable. Mais ça reste une fille, enfin, c'est pas quelque chose que tu dois beaucoup connaitre... T'en fais pas, un jour, toi aussi, tu perdras ta petite fleur. Je t'aiderais ! Trouver une fille avec des goûts de chiottes qui accepterait de coucher avec toi, ça doit être possible, non ? »

Bien que Troy n'hésita pas à ouvertement sous-entendre qu'Harrison était puceau et qu'il sache bien que c'était faux, il lui accorda un petit sourire aussi provocateur qu'insolent, bien décidé à avoir sa revanche sur Pierce. Après tout, s'il s'autorisait à jouer avec les nerfs du quaterback, pourquoi n'en ferait-il pas de même ? Ces vannes faisaient de toute manière désormais parti de leur quotidien, il fallait qu'ils l'acceptent. Ceci dit, à l'entente de sa dernière moquerie à travers laquelle il rappelait les dernières paroles de la jeune fille, Troy ne se fit pas attendre une seule seconde supplémentaire pour y répondre alors qu'il se baissait en vitesse pour ramasser la bouteille de lait vide dans la poubelle.

« La ferme. Oh, et, tiens, ton café ! »

Ainsi, c'est avec force et vitesse que Troy jeta sa bouteille vide en direction d'Harrison, laquelle vint doucement taper contre le sommet de son crâne alors que le beau brun s'empressait de quitter la chambre pour aller cherchait du lait à l'étage inférieur, bien qu'il sache qu'il allait remonter quelques minutes après seulement.